Jardins persans

Palais-jardin de Dowlatabad, Yazd, 18e siècle. Photographie : ©Patrick Ringgenberg.

Au temps des Achéménides (6e-4e siècle avant J.-C.), les rois possédaient des jardins d’acclimatation : les paradeisos en grec, d’où vient notre mot « paradis ». Soigneusement irrigués, les arbres et les plantes de différentes provenances offraient un condensé des couleurs parfumées de l’univers. Apanage royal, symboles de l’ordre cosmique et de l’harmonie impériale, ces « paradis » étaient un lieu de repos, de banquet et de chasse.

bagh pasargad

Plan de Pasargades, capitale palatiale achéménide fondé par Cyrus le Grand (6e siècle avant notre ère). On y voit le premier exemple connu de jardin persan, le chahar bagh ou « quatre jardins » : un espace quadrangulaire divisé en quatre par deux canaux se coupant en croix.

Source de l’illustration : ©Patrick Ringgenberg, Guide culturel de l’Iran, Téhéran : Rowzaneh, 2006.

Jardin de Fin, Kashan, 17e siècle. Photographie : ©Patrick Ringgenberg.

La tradition du jardin s’est perpétuée avec les Sassanides, et la culture persane a transmis au monde musulman l’amour des fleurs et de ces printemps en miniature. Elle a aussi créé un jardin original, appelé chahar bagh (littéralement : « quatre jardins »). On peut déjà voir son principe à Pasargades, la capitale de Cyrus II au 6e siècle avant J.-C. Deux canaux se coupent à angle droit et forment une croix, dont le centre est occupé par un bassin : des arbres fruitiers et des fleurs s’épanouissent sur les quatre parterres structurés par la croix. Dans les palais ou les riches maisons, un kiosque ou une salle voûtée surplombent cette musique d’eau et d’efflorescences.

Représentés sur des tapis (les « tapis-jardins »), les chahar bagh ont également inspiré l’urbanisme de ville-jardin, comme l’Ispahan des Safavides. Ils puisent leur symbolique dans le Coran (XLVII, 15), qui compare les béatitudes contemplatives du paradis à quatre fleuves et à un jardin parfumé, traversé d’eaux courantes, généreux en fruits. Le bassin central est une image du cœur spirituel, qui s’unit au Divin comme le miroir d’eau au ciel qu’il reflète. Il symbolise également la Source de Vie, dont l’eau (les canaux) se diffuse dans toutes les directions de l’univers. La végétation offre une palette de couleurs, de senteurs et de beautés, mais aussi de significations symboliques et de qualités médicinales.

Jardin de Shahzadeh, Mahan, fin du 19e siècle. Photographie : ©Patrick Ringgenberg.

Des jardins royaux des premières dynasties musulmanes, il ne reste malheureusement que des évocations littéraires. Les jardins les plus anciens datent de l’époque safavide, comme le jardin de Fin à Kashan, du 18e siècle (jardin de Dowlatabad à Yazd), et surtout de l’époque qajar, comme le magnifique jardin de Shahzadeh à Mahan, de la fin du 19e siècle. Mais le jardin persan a semé loin à la ronde ses terres du ciel. Son influence se retrouve surtout dans l’Inde moghole du 17e siècle, comme les fameux Shalimar de Srinagar (Cachemire), de Delhi et de Lahore, ou les jardins du mausolée du Taj Mahal à Agra. 

Pour en savoir plus sur les jardins persans, on peut recommander ces livres :